passé désinspiré

L’homme a eu lieu…
Merde, ça vient pas.
D’habitude, parce qu’il ya eu une habitude, quand il me prend l’envie de pondre une note, parce que mes oeufs ne sont pas mangeables, je me trouve un mot, ou deux, ou trois, je les lâche sur la page, et puis le reste vient tout seul. Je les regarde se multiplier sagement, les uns derrière les autres, les observant d’un oeil maternel, attentif et bienveillant. Parfois, il faut remettre un peu d’ordre dans tout ça, je dois leur apprendre à ne pas non plus faire n’importe quoi, mais les encourager quand même quand leur viennent des initiatives heureuses, ou pas. S’ils ne font pas la connerie une fois, jamais ils ne retiendront les leçons de la page.
D’habitude, ça se passe comme ça.
Mais là, « l’homme a eu lieu », ça marche pas.
Je descends cinq minutes, le temps d’une clope. Je verrai bien s’ils ont été sages et s’ils ont fait leurs devoirs quand je reviendrai.
Je remonte. Et toujours rien.
Bon, peut-être que ça vient de moi. Peut-être que je les ai un peu surestimés, peut-être qu’ils ne sont pas encore en âge pour ça…
Ou bien peut-être qu’ils ont dépassé ce stade -là ?
Peut-être que le thème de départ leur plaît bien, mais que ce temps passé décomposé tout pourri, ça craint.
Et qu’en fait, si je leur parle au futur, maintenant, ça les branchera un peu plus…
Mes chéris, si je vous dis « l’homme aura lieu », qu’est-ce que ça vous évoque ?

Ils me répondent que l’homme aura lieu un vendredi, ou peut-être un mardi. Qu’il aura des yeux noirs qui rient après la pluie. Qu’il portera une casquette et une veste de tweed et que ça me fera sourire parce que lui aussi, sa casquette elle est toute pourrie. Il pouffera de certains auteurs ou musiciens que je voue aux nues, et me renverra paître aux gémonies quand je lui dirai que son truc qu’il écoute là, ça pue du cul. Il peut éventuellement se permettre d’être vachement grand ou bien se ranger dans ma poche. Il aura vécu des dizaines de vies et me les racontera toutes, les unes après les autres, en commençant par la plus belle et qu’il ne connaît pas encore. Il aura mille ans devant lui pour le faire et chaque année pour noël, j’en trouverai un morceau fourré dans un chocolat surprise. Je reconnaîtrai le piège, parce qu’il aura encore mal remplié l’emballage de ce mini cheval de Troie qu’il voudra me voir croquer en faisant ma tronche de travers et mes yeux affolés en pensant que merde je me suis pété un plombage avec ces conneries.
L’homme aura lieu et je lui organiserai une petite place avec des heures autour, pour la déco, au creux de ma vie. L’homme aura lieu et on trouvera le temps.
L’homme aura lieu et …

Who. On se calme les lapinous. Vous allez quand même pas contredire maman. Je vous dis que je crois pas au prince charmant.
Maman, t’es con, qu’ils me répondent. C’est pas un prince charmant, c’est rien qu’un homme qui se sera arrêté pour te demander l’heure, et qui aura vu que vous avez la même.

cuisine

J’hésite entre le meurtre collectif ou individuel.
Est-ce que je prends l’avocat, que je lui arrache un bras pour étrangler le banquier avec ? Oui, mais mon employeur risque de se sentir délaissé. Ou alors je mixe le banquier, je fourre mon employeur avec, j’empaquette le tout avec les boyaux de l’avocat et je passe au four thermostat 12 ?
Mon coeur balance.

la fête est ratée

Bon, si on vous demande, surtout, vous dites que je vais très mal, que je montre des symptômes dépressifs graves et que tout cela est bien évidemment dû à une souffrance ancrée dans les tréfonds de mon âme, mon âme meurtrie dès ma plus tendre enfance.
Pauvre être rejeté par ses semblables, incapable de surmonter l’épreuve surhumaine que la vie lui a imposée, femme seule et vouée au célibat puisqu’aucun homme jamais ne voudra d’elle. Voilà telle que vous me voyez. Cela ne fait aucun doute, aucun pli, et vous en jetteriez votre chaussette gauche dans le poëlle à bois de mamie Jacqueline.

Faudrait que je puisse expliquer un peu pourquoi tout ça, mais d’une part, vous êtes des gens merveilleux qui n’avez pas besoin d’explications, et d’autre part, c’est un peu compliqué …

Tous les jolis petits projets bien ficelés que je me suis préparés pendant l’automne s’avèrent être bien plus tarabiscotés qu’initialement prévu.
Et tout cela me fatigue beaucoup beaucoup.

Et puis le seul moment où j’ai le temps d’écrire, l’envie n’est pas là, les mots non plus, la page est une grande maison où se prépare une immense fête, les quiches sont sur la table, les noms sont écrits sur les gobelets en plastique, mais personne n’a invité personne, tout le monde s’est planté dans la date, dans l’heure, dans le lieu.

Turquie ?

Y fallait bien que j’me dépêche, sinon j’allais être à l’heure.
Cerveau embrumé de trop peu de sommeil.
Une bonne heure ce matin, de la douche aux chaussures noires, du pull rose au bol de céréales, de finalement non j’vais pas mettre les noires elles me font mal aux pieds à putain mais chuis à la bourre et pourquoi ils ont déplacé la route depuis hier.
Une bonne heure à jujoter tranquillou dans mes rêves de pays amoureux, où un gentil bandit et son chauffeur nous enlèvent en mercedès noire qui brille à la sortie de l’aéroport pour nous mener dans des paysages de torrents d’eau tiède où trônent des cristaux géants de glace ou de sel. Des chemins à construire au fur et à mesure que l’on pose des tuiles par terre, l’argile dessine des chemins, des rigoles d’eau de pluie, et les deux taureaux noirs en profitent pour faire la course avec nous. Une maison, un palace, une demeure tranquille et sereine ouverte sur l’eau, la terre et la végétation. Une rampe d’escalier sur laquelle je glisse, m’accroche, saute et m’envole pour gagner la course taquine contre les deux taureaux qui redescendent.

D’ailleurs, je crois que j’y suis encore, dans mes rêves d’eau blanche et de bouillons argentés. Toujours cette amie perdue de vue depuis le lycée. Toujours elle. Peut-être une barrière sans importance au final, sinon celle que je lui donne sans vraiment le vouloir.

Je me force à glander dix minutes pour jeter quelques mots ici. Anesthésiée par l’optimisme et l’energie, je ne sens plus mon travail passer. Je rentre ensuite bien sagement à la maison et… non, en fait, je préfère ne pas y penser. Le vivre m’est moins pénible.

Je me demande ce qui rend les hommes si lâches et si faibles. Pas tous. Non. Juste ceux chez qui j’ai l’occasion de le remarquer.
Mais un peu de colère dans tout ça, je m’en réjouis.

Toutes mes excuses pour mes non-réponses à vos commentaires. J’ai l’air de m’en foutre ? En fait non. Je m’en veux un peu. Parce que j’aimerais faire les choses bien. Parce que j’aimerais toujours faire les choses mieux. Sans trop savoir si je prends trop de temps pour penser et pas assez pour agir. Enfin si, je sais. Je sais bien.

J’aimerais entrer en contact avec le monde qui m’entoure. Et j’ignore comment faire.

Et moi je suis un homme qui aime bien ce genre de …

Les mots ruminaient depuis quelques jours, broyant au passage quelques idées noires, quelques lueurs d’espoir, mais aucune lumière. J’voulais d’l’amour, j’voulais l’revoir, j’voulais l’faire rire et compter ses cheveux dans l’noir. En réponse au silence asphyxiant, mon sommeil a crié stop et m’a empêché de dormir.
Alors j’ai écrit quelques mots sur un téléphone portable, je n’ai eu qu’à finir la phrase que je m’étais refusé d’achever quelques jours plus tôt. ça commençait par bonsoir. J’ai effacé le bonsoir. Mais je n’ai pas remplacé par la rime qui me trotte dans la tête.
ça aurait été bien si.
Un peu de franchise, un minimum de sincérité. ça aurait été bien si.
En tout cas, ça aurait été mieux.
Deux heures du matin. J’espère l’avoir réveillé. Monsieur bonsoir.
Deux heures du matin. J’ai pu détendre mes quelques muscles qui restaient coincés.
A cause de lui, monsieur bonsoir.
Un semblant de sourire. J’aime bien ce sentiment de liberté qui suit les ruptures, même si je ne sais jamais bien à qui tout cela est infligé.
J’ai pu m’endormir, et penser enfin en me réveillant que la vie reprend.
A croire que l’espoir d’un amour, ça fait crever un peu.